vendredi 27 janvier 2012

[VIEUX DOSSIERS] En Enfer


[EDIT] Les évènements relatés dans ce billet sont dus au débutant que j'étais en ZEP. Maintenant, on ne dit plus qu'on est athée, on fait des sciences et on parle d'évolution.


Vous irez en enfer. Voila ce que m'a dit une petite sixième l'autre jour. Je leur expliquais plus ou moins brillamment les différences entre l'Homme et les autres animaux, et en suis venu à leur dire que les animaux s'en foutaient des religions, qu'ils n'avaient pas conscience de ça. La gamine me demande si je crois en dieu et moi qui suis taquin sur ce point, je lui dis que non. Elle me réponds alors, "donc, vous croyez au diable". Charmant racourci théologique. Je lui explique rapidement que si je ne crois pas en dieu, je ne crois pas au diable non plus. Elle me lance "vous irez en enfer". Et persiste à croire que je crois au diable. Je lui explique en gros que le diable étant un ange déchu, il n'est pas possible pour moi d'y croire plus qu'en l'Autre. Elle me dis que je suis "tordu avec mes trucs" et que j'irai quand même en enfer.
" Tordu". Ces gamins ont une vision tellement déformée du monde réel que c'est nous qui apparaissons déformés à leur yeux. On est pas de la même planète parfois.

Moustique adultère


vendredi 20 janvier 2012

[VIEUX DOSSIERS] épisode 1

Cette petite série de billets est consacrée à ma première année dans un collège de ZEP que j'ai quitté depuis (pour un autre, haha, très drôle). Elle sera signalée par l'encadré [VIEUX DOSSIERS], dont voici le premier épisode, soit le tout premier post, en version non-corrigée et non améliorée d'époque (2008) :

"J'ai envie de niquer"


Ce jour, là, S., un des élèves de SEGPA dont j'ai la charge (hé oui, c'est lourd) m'accueille en me lançant en classe "Monsieur, j'ai envie de niquer aujourd'hui" (avec un fort accent alsacien, imaginez). Je lui réponds, que tout ceci est "très bien" mais que la classe n'est pas le bon endroit pour cela. On a donc passé deux heures à écouter les descriptions plus ou moins imagées et détaillées de ce que ferait Simon s'il avait un bout de viande (une femme, quoi) sous la main : vocabulaire très fleuri, mimiques de l'acte sexuel avec une table, le tableau etc. Tout un programme. Je lui propose de rentrer à midi et d'aller se soulager aux toilettes, trente secondes et hop, on en en parle plus. Il me rétorque que quand même (comême...), trente secondes pour une branlette, c'est un peu court (quand même). Je l'ai revu l'après-midi. Il m'a dit avec un grand sourire qu'il s'était soulagé durant la pause, à la maison. Je lui demande s'il s'est bien lavé les mains après, il me fait oui ; c'est important de parler d'hygiène avec ces gamins là...

Une bataille mais pas la kerre

Nous sommes (étions, en fait) le 18 Janvier, un de mes pires élèves de segpa vient d'écrire sa leçon dans son CAHIER QU'IL VIENT D'ACHETER POUR ÉCRIRE SA LEÇON DEDANS, PUTAIN, QUOI !
Après un trimestre passé à écouter son baladeur et à envoyer des textos, c'est un victoire que je savoure.
Plus que 5 restant à faire la même chose et on sera à la fin Juin...
Kerre gross malheur, mais parfois ça vaut le coup, et sans coup de feu de tiré.

Le tube digesteur

L'étude du tube digestif est toujours une bonne occasion de rigoler et de mettre certains détails au point. Ca permet d'abord de flatter le côté pipi-caca de nos élèves (et le notre, parce qu'il n'y a pas de raison pour que nous ne rigolions pas un peu aussi, hein) et de répondre à des questions du genre : "pourquoi on vomit", "pourquoi on a la diarrhée" ? C'est trivial mais on ne leur apprend pas ces choses là, aux gosses de collège, donc, personnellement, je me fais une mission de leur apprendre, et c'est plus amusant.
Ensuite, le schéma ci-dessus permet de mettre en évidence le conflit socio-cognitif (comme on dit chez les didacticiens, heu heu) chez certains mômes. En effet, certains (et certaines) n'ont pas encore, en cinquième, une idée très précise de la tuyauterie qui compose leurs appareils digestif, urinaire et sexuel. Ce qui m'a amené à répondre à une question toute bête mais importante pour permettre de modifier la représentation qu'avait l'élève : "mais, monsieur, les point noirs, là, c'est de la merde ? Mais les bébés, ils sortent aussi par là ? Bêêêêê !" (Air dégoûté et incrédule).
La réponse fut toute aussi simple et triviale, le genre de moment qui n'arrive pas souvent : "le caca et les bébés ne sortent pas du même trou, ce sont des tuyaux différents".
Putain, ça va me manquer si un jour j'ai ma mutation à la campagne.